Analyse du budget de la ville : priorités, projets, impôts, endettement

Quelles sont les priorités municipales affichées par le budget 2021 de Sceaux ? Pourquoi augmenter les impôts locaux ? Le niveau d’endettement est-il anormalement élevé ? Notre analyse didactique qui explique pourquoi nous n’aurions pas voté le budget qui a été adopté par le seul groupe municipal du maire.

Lors du Conseil municipal du 25 mars 2021, les deux groupes d’opposition ont quitté la séance à 1h du matin dénonçant des conseils municipaux qui durent toute la nuit. A la vue des conditions de déroulement des deux conseils précédant (terminés à 7h et 4h30) , ils avaient demandé à plusieurs reprises et sans succès que le vote du budget ne soit pas abordé à la fin de l’ordre du jour de la séance. A 1h, alors que l’examen du budget n’avait pas débuté et devant le refus d’ajournement du maire, ils ont quitté le conseil dénonçant ce non-respect du débat démocratique.

Le budget a été adopté par le seul groupe municipal du maire
Sceaux en commun a fait une analyse de ce budget et explique pourquoi il ne l’aurait pas voté.


Les caractéristiques du budget de Sceaux

Le budget de fonctionnement et d’investissement de la ville de Sceaux atteint 75 millions d’euros. Au regard des villes limitrophes de populations comparables, les dépenses de la ville sont particulièrement élevées. 

Moyenne en € des dépenses par habitant sur les trois derniers budgets

  • Dépenses de fonctionnement     
    Sceaux : 2 000 €/h        Bourg la Reine : 1 600 €/h    Fontenay : 1 500 €/h
  • Dépenses d’investissement
    Sceaux : 1 200 €/h         Bourg la Reine : 900 €/h    Fontenay : 400 €/h

La ville de Sceaux comptait, au 1er janvier 2021, 398 emplois permanents. Un effectif à peu près équivalent aux autres villes similaires (Bourg la Reine : 360 agents)        

Contexte budgétaire 2021

La crise du Covid 

La pandémie n’affecte pas fondamentalement le budget de la ville. Les dépenses dues au Covid s’élèvent à 390 000 € (soit 1% du budget de fonctionnement).

La politique du gouvernement

Le budget de la ville est fortement dépendant des politiques adoptées par le gouvernement.  Cette année la ville est affectée par : 

  • la baisse de la dotation globale de fonctionnement en raison de l’application du dispositif d’écrêtement, la baisse des variables d’ajustement. Cette nouvelle baisse de la DGF représentera une perte de l’ordre 92 000 € en 2021
  • les dépenses de personnel dues à des mesures nationales notamment de reclassements indiciaires. Pour Sceaux les dépenses de personnel progressent mécaniquement d’environ 4,3% par rapport au budget 2020.
  • la suppression totale de la taxe d’habitation comme impôt local remplacé par une compensation inférieure de l’Etat. Pour Sceaux, cela représente une perte de l’ordre de 730 000 € de recettes.

L’intercommunalité

Sceaux appartient à la Métropole du Grand Paris (MGP) et de nombreuses compétences sont prises en charge par l’Établissement public territorial (EPT) Vallée Sud –Grand Paris qui regroupe les 11 communes.

La création de la MGP et de l’EPT n’a pas d’impact financier négatif pour la commune. L’EPT mutualise des compétences (eau et assainissement, gestion des déchets, développement économique, équipements culturels et sportifs, transports locaux, plan local d’urbanisme et aménagement, etc.) et dispose de recettes propres notamment la contribution sur les entreprises, plus nombreuses dans les autres communes qu’à Sceaux.  

La ville participe aux mécanismes de solidarité territoriale entre communes riches et pauvres. Sceaux est considérée comme une ville riche, le revenu moyen par habitant y est l’un des plus élevés en France.

La mauvaise réforme de la Taxe d’habitation imposée par le gouvernement
Le gouvernement a décidé de supprimer la TH et de la remplacer par une  dotation de l’État versée aux communes.  A Sceaux, aujourd’hui près de  50% des habitants ne payent plus la TH. Plus aucun habitant ne la payera  en 2023. La commune perd 100% du produit de la taxe d’habitation  remplacé par une dotation qui est fixe et inférieure. Dorénavant, la  fiscalité locale reposera uniquement sur les propriétaires au travers de  la taxe foncière.

Quels sont les choix budgétaires de la majorité municipale ?

Face à des recettes en forte baisse en raison du manque à gagner dû à la réforme de la TH, aux dotations de l’État qui décroissent encore et à l’augmentation mécanique des frais de personnel de la ville, la majorité municipale fait des choix contestables.

  • Pas d’économie prévue 

Les dépenses de fonctionnement seront ainsi en hausse de 1,8%, bien supérieure à l’inflation
Les dépenses de fonctionnement sont maintenues à un haut niveau. Des dépenses nouvelles sont aussi décidées notamment pour la vidéosurveillance de la population : installation de caméras, installation d’un centre de vidéo-surveillance, renforcement des effectifs, deux postes supplémentaires en 2021. 

 L’investissement sera maintenu en 2021 à un niveau équivalent aux années précédentes, après le pic des dépenses d’investissement de 2018 et 2019.  
Les dépenses d’investissements resteront elles aussi importantes. Le centre-ville, avec notamment la rénovation du parvis de l’église et la restauration de l’église (en 2021 plus de 3 millions d’euros), restent prioritaires. Les rues devraient connaître encore des travaux de rénovation, d’enfouissement des réseaux électriques et d’éclairage public (pour un total de 2,7 millions), principalement dans le quartier des Chéneaux. 

  • Augmentation du taux de la taxe sur le foncier bâti 

Pour trouver des recettes nouvelles, la majorité municipale a décidé d’augmenter le taux de la taxe foncière bâtie, porté à 33,52%, en hausse de + 4, 9%. Le produit supplémentaire attendu par cette hausse est de 700 000 €. 
Le taux de la taxe foncière atteint ainsi un record, bien supérieur aux villes limitrophes, 30 % plus élevé qu’à Bourg-la-Reine (avant modification éventuelle de ces taux en 2021).
Sceaux : 33,5%, Bourg-la-Reine : 24,4 %, Fontenay-aux-Roses : 24,6 %, Antony : 25,8 %, Châtenay-Malabry : 26,9 % 

  • Une dette très importante qui ne va pas diminuer

En 2021, la ville ne prévoit pas de diminuer l’encours de sa dette qui est particulièrement élevé.
Au 1er janvier 2021, l’encours de la dette à long terme (> 2 ans) s’élève à 53,4 millions d’€ , soit une dette par habitant de 3 300 €, à comparer à celle de Bourg-la-Reine 1 300€/h ou de Fontenay-aux-Roses : 1 000 €/h.
Le montant des intérêts annuels n’est pas négligeable : 1,1 million d’euros en 2021. S’il est en diminution en raison de la baisse des taux, un risque subsiste avec cet encours particulièrement important dont la moitié est à taux variable. 

D’autres choix budgétaires s’imposent

Faire mieux avec moins

Le budget est figé dans une logique passée qui n’est plus supportable. D’autres choix budgétaires sont nécessaires mais cela implique une nouvelle approche de la gestion locale : faire mieux en dépensant  moins, c’est possible dans bien des cas, mais le budget ne reflète pas cette priorité.

Les dépenses inutiles doivent cesser : investissement massif dans des caméras de vidéosurveillance dont les études montrent l’inefficacité, éclairage inutile et nuisible au cœur de la nuit, dépenses de communication au service d’une pseudo concertation avec la population. Lorsque travaux et grands projets sont décidés, ils doivent servir une vraie ambition écologique et ne pas se contenter du minimum réglementaire ; de même s’il est normal d’attribuer des subventions aux association scéennes, elles doivent l’être à travers des priorités clairement établies et être valorisées au profit de tous. Les aides doivent en priorité permettre un rééquilibrage des moyens envers les populations et les quartiers qui en ont le plus besoin.

Rendre plus démocratique les choix budgétaires

Le budget participatif de Sceaux est doté d’un montant très bas (50 000 €, 0,1% du budget de la ville). La sélection des dossiers est opaque, des projets sont refusés avant d’être présentés aux votes. Seuls 3 ou 4 projets pourront finalement être réalisés, malgré un grand nombre d’idées séduisantes, une forte implication des Scéens qui déposent des projets, une importante communication de la ville. Nous alertons sur le risque de démobilisation et de découragement des Scéens, si nous restons sur ces modalités. Par ailleurs, les Scéens doivent pouvoir participer au choix des investissements importants. La ville de Paris s’est par exemple engagée à décider de 25% de ses investissements via un processus participatif : c’est possible aussi à Sceaux.